• Luc Bérimont

    Luc Bérimont (1915 -1983) Il passe une enfance heureuse dans le Nord au sein d’une famille modeste originaire des Ardennes. Sa rencontre avec Jean Bouhier, fondateur de l’École de Rochefort sera décisive. Il s’installe à Rochefort et se reconnaît pleinement dans ce cercle poétique où se nouent de profondes amitiés. Sa poésie, puisant sa force dans la nature traduit un rêve d’unité avec une allégresse traversée cependant par une profonde inquiétude.

     

     

     

     

    LA NUIT D’AUBE

     

    Une rose a percé la pierre de la neige
    Une rose a percé la pierre de l’hiver
    Galopez dans le ciel, chevaux blancs des cortèges
    Une rose a percé la pierre de la neige.
    Une rose a tremblé sur la paille, à l’auberge
    L’ange au gantelet noir roule sous les sapins
    Une rose a tremblé, plus frileuse qu’un cierge
    La neige lacérait le ciel ultramontain.
    Édifice du temps un enfant vous renverse
    Une rose, une lampe, une larme au matin.
    Il suffit d’un baiser qui réchauffe la neige
    Et notre rose à nous brûle déjà ta main.

     

    Luc Bérimont


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  • Samantha BarendsonNée en 1976 en Espagne, de père italien et de mère argentine, Samantha Barendson vit aujourd’hui à Lyon et travaille à l’École normale supérieure. Poète et romancière, elle aime surtout travailler avec d’autres artistes, poètes, peintres, musiciens, illustrateurs ou photographes. Elle aime ensuite dire ses textes sur scène, un peu frustrée de n’être pas une chanteuse de tango.

     

    Il y a comme un air
    De cimetière militaire
    Pourtant tout est vivant

     

    Courir derrière les mouettes
    Avec des cris d’enfant
    Attraper les ficelles
    Qui mènent aux cerfs-volants

     

    Samantha Barendson


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  • La poésie s'en est allée
    Je la soupçonne d'être passé par chez toi
    De s'être allongée dans ton lit
    Et d'avoir écouté la pluie sur le toit
    Elle avait si peu à confier
    Pas du genre à trop s'épancher quelques mots
    Qu'elle a laissé sur ton bureau
    Quelques ratures au stylo
    Puis elle s'en est allée
    Puis elle s'en est allée 

    Il nous a fallu quelques jours
    Pour être moins aveugle et sourd et trouver
    Que l'air était un peu plus lourd
    Nos épaules un peu plus rentrées et penser
    Qu'après avoir tant annoncé
    Un départ mille fois reporté, elle rêve
    Ôter le manteau du crochet
    Où depuis des siècles il pendait
    Puis s'en était allé
    Puis s'en était allé 

    Sommes-nous des enfants perdus?
    La forêt à perte de vue pour le soir
    Refuse de nous abandonner
    De laisser à l'obscurité tout pouvoir
    Sur notre histoire mal engagée
    La pleine lune est convoquée pour déjouer
    Les pièges d'une nuit trop noire
    Aux abords d'un abattoir
    Sans un poème pour nous sauver
    Sans un poème pour nous sauver 

    Je n'sais pas pourquoi je pensais
    Qu'elle n'avait pas pu s'en aller, sans passer
    Par chez toi et sur ton bureau
    J'ai vu les ratures au stylo, quelques mots
    Qui se sont glissés sur ma peau
    Sur ton visage et sur tes mains ils ont pris
    Le rythme d'un cœur en sursis
    Et leur peau était faible aussi
    Mais il faudrait s'y accrocher
    Mais il faudrait s'y accrocher

     

    Dominique A


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  • Anne-Lise Blanchard

    Anne-Lise Blanchard qui fut danseuse, chorégraphe avant d’être thérapeute puis conférencière, nomadise entre Lyon, les Alpes et le Proche-Orient où elle travaille depuis 2014 au sein d’une organisation humanitaire. Elle est l’auteure d’une trentaine de livres dont plusieurs recueils de haïkus, des récits, et des poèmes en anthologie.

     

     

     

     

    A l’ombre du figuier

    Je recense mes paysages

    tableau pour une vie

    *

    Voussure d’une hanche

    sur un drap blanc étarqué

    souvenir d’un émoi

    *

    Couple de gabians

    face à la montagne violette

    mieux qu’une carte postale

    *

    A pic des falaises

    au delà du romarin

    tenir son chapeau

    *

    Comme oiseaux transis

    les bateaux sous la tempête

    serrés flanc à flanc

    *

    La chair de la figue

    son duvet lissé du doigt

    cède sous nos dents

     

    Anne-Lise Blanchard


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  • Zéno Bianu

    Né à Paris en 1950, Zéno Bianu est l’auteur d’une œuvre multiforme, interrogeant à la fois la poésie, le théâtre et l’Orient, œuvre que Bernard Noël a pu comparer à une "sueur d’étoiles internes". En 2017, il reçoit Le Prix Robert Ganzo pour l’ensemble de son œuvre à l’occasion de ses deux livres : Infiniment proche/Le désespoir n’existe pas aux Éditions Poésie/Gallimard) et Satori Express aux Éditions Le Castor Astral.

     

    et je nage
    dans cette eau d’avant tous les ciels
    en haute et douce écume
    et je nage
    là où tous les deltas
    commencent
    à remonter vers leurs sources
    et je nage dans cette eau si eau
    qu’elle en devient
    rêve liquide
    offrande de silence
    mille siècles de vie

     

    Zéno Bianu


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  • Anne Marie BERNAD

    Anne Marie Bernad est née à Decazeville et réside actuellement à Rodez. Elle est membre de la Société des Lettres de l’Aveyron et a été trésorière pendant dix ans des Écrivains du Rouergue. Elle a été honorée du Prix Voronca en 1973 pour son œuvre Entre sable et argile, aux Éditions Subervie

     

     

    Temps
    au regard vide
    d’une rue
    d’une fenêtre noire
    page mouillée
    innocence
    hurlée dans l’inutile
    le drame
    sans un mot
    concert anorexique
    rire enfoui
    tournant du rêve
    la galaxie de l’être
    s’entoure de l’étrange
    l’essentiel se concentre
    dans l’inépuisable
    il peut naître
    du noir et du blanc
    une silhouette

     

    Anne Marie BERNAD


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  • Jean-Marie Barnaud

    Jean-Marie Barnaud naît à Saintes en 1937. Habitant Mougins, il collabore notamment aux revues N4728, Europe, Nu(e), entre autres…Son œuvre poétique est majoritairement publiée au Cheyne éditeur où il dirige par ailleurs, avec Jean-Pierre Siméon, la collection Grands fonds. Il a reçu le Prix Apollinaire 2010 pour Fragments d’un corps incertain publié au Cheyne éditeur en 2009, ainsi que le Prix Georges Perros pour Bleu et quoi d’autre paru au Cheyne éditeur en 2001.

     

    TERRE EN VUE

     

    Le plus souvent
    la joie court sa chance
    loin des beautés somptuaires
    se nouant impérieuse à vous
    soudaine dans le temps gris
    où le corps s’époumone
    pieds et poings liés et le dos convulsif

    Et la voilà chanteuse qui vous dresse
    pour presque rien
    rendu enfin au vrai labeur
    à ce rien de liberté farouche

    Et pour un peu on volerait
    porté par elle depuis ces traces menues
    abandonnées comme autant d’effilures :
    un éclat de lumière
    sur le vitrage plombé d’un immeuble
    un regard dans les reflets d’une vitrine
    où la foule tressaute
    un visage posé là comme un phare
    sur le quai
    quand la dernière rame vous arrache
    dans les soubresauts d’un voyage sans autre paysage
    que sa boucle d’amertume
    sans aventure pour les corps terrassés des voyageurs
    indifférents à leur propre rumeur

    une terre enfin
    une Italie
    dans ce profil dépris de soi
    dépris du temps
    comme un dormeur qui s’est confié aux dieux du seuil

     

    Jean-Marie Barnaud


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  • Edith AzamNée le 02 août 1973 à Alès (Gard), Edith Azam est diplômée en Lettres modernes et Sciences de l’éducation. Après trois ans d’enseignement dans une école, elle se consacre à l’écriture. Elle participe à de nombreux festivals de poésie.

     

     

    Chante pour cette histoire
    qui danse sur nos vertèbres !
    Nous sommes l’inconnu Maman
    nous sommes ce grand feu
    qui ne brûle que pour nous
    qui ne nous brûle que nous
    mais qu’importe Maman chante !
    Chante pour l’impossible
    pour un peu d’air voilà !
    Des caissons d’oxygène !
    Des océans du ciel !
    La lumière des orages !
    Du vent de la douceur !
    Un air à emporter !

     

    Edith Azam


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  • Maurice Audejean

    Maurice Audejean (1942-1992) Berger en Camargue, amoureux de la poésie, il est filmé en 1967 par Michel Polac dans le cadre de l’émission « Bibliothèque pour tous ». Il dit alors son admiration pour René Char. Celui-ci qui voit l’interview le contacte. Une correspondance et une amitié naissent entre les deux hommes. Poésie dépouillée, proche de l’aphorisme parfois, elle exprime une certaine fragilité de la vie.

     

    Je cherche ce qui n’existe pas. Je chante ce qui n’a pas de nom.

    J’ai une grande réserve de soleils levants.

    Terre de la très douce étrangeté à soi.

    Cette pluie nous fait une respiration plus douce, le soleil lui-même coule vers les prés.

    L’eau coule, bouche ouverte.

    Au singulier, il y a tout le pouvoir du mot.

    Front, à petits coups répétés, pour franchir l’appartenance.

    La vie cristalline, la vie rosée, où s’appuie la patience.

    La vie comme un peu d’eau guérie, échappée du réel.

    Sous la neige aux petits yeux brillants, se rassemblent les fous.

     

    Maurice Audejean


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  • Nikolina Andova Shopova

    Nikolina Andova est née en 1978 à Skopje. Elle est diplômée de Littérature slave méridionale et Macédonien de l’université Saint Cyril de Skopje. Auteure de haïkus, ses textes ont été publiés dans une anthologie des nouveaux haïkus macédoniens. Elle fait partie des cinq auteurs étrangers invités en France dans le cadre de Versopolis.

     

     

    Ici tout est transpercé
    le ciel que l’on scrute dans les lunettes astronomiques
    et les chemises perforées des dossiers sur nos bureaux
    les petits hublots des cabines de bateaux lorsque nous naviguons
    et les murs massifs des églises dans lesquelles nous prions

     

    Nikolina Andova Shopova


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