• Robert GanzoRobert Ganzo, né en 1898 à Caracas, mort en 1995 à Boulogne-Billancourt, est un poète d’origine vénézuélienne d'expression française. Décerné pendant le festival « Étonnants voyageurs », le prix Robert Ganzo entend saluer un poète de tempérament, un aventurier du verbe et de la vie, un passeur d’émotions et de défis, un arpenteur de grand large et d’inconnu.

     

    Si même il ne restait qu'un écriteau sur terre : « défense de pêcher car c'est notre rivière » : nous serions révolutionnaires. 

    Si même il ne restait qu'un prince sur la terre, qu'un prince et sa couronne et son divin mystère, nous serions révolutionnaires. 

    Si même il ne restait, aux confins de la terre, qu'un douanier gardant un mètre de frontière, nous serions révolutionnaires. 

    Si même il ne restait qu'un canon sur la terre, rien qu'un canon et rien qu'un dernier jour de guerre, nous serions révolutionnaires 

    Si même il ne restait qu'un bagne sur la terre, qu'une seule catin, qu'une seule misère, nous serions révolutionnaires. 

    Et s'il ne restait sur la terre,

    Sur terre, parmi nous enfin

    qu'un prolétaire avec sa faim, 

    nous serions révolutionnaire

     

    Robert Ganzo

     


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  • Anita Conti

    Océanographe, ethnologue, écrivain et humaniste, Anita Conti (1899-1997), née Caracotchian, dans le Val d’Oise, et morte à Douarnenez, est l’une des grandes photographes du XX siècle, l’inoubliable "Dame de la Mer ". 

     

     

     

    Pourrais-tu ignorer
    Que chaque jour, Pour Toi,
    un ciel entier s’éclaire ?

     

    À Tous les pas de cet élan
    qu’est notre vie
    À tous les jeux de cette rage
    J’ai ouvert les bras
    Et gémi

     

    Et sur le grand vent refermé,
    Au long des temps
    Mes bras heureux brûlent encore
    De leur désir.

     

    Anita Conti


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  • Hubert Mingarelli

    Hubert Mingarelli : Né en1956, mort en 2020. Ce lorrain arrête l'école à 17 ans pour s'engager dans la marine. Il va donc voyager, surtout en Méditerranée.et dans le Pacifique. A son retour, il entreprend un périple à travers l'Europe, qui le conduit à Grenoble où il s'installe. Il commence à publier en 1990. Il est lauréat du Prix Médicis en 2003 pour son roman "Quatre Soldats".

     

    J’ai ouvert la cage

     

    J'ai ouvert la cage en pensant

    il ne partira pas parce qu'il est bien ici.

    En plus, j'ai posé la cage

    sur le bord de la fenêtre

    à côté du soleil

    il y avait un peu de vent aussi.

    Et la porte de la cage

    s'ouvrait et se refermait

    Je ne l'ai pas vu s'envoler.

    Je l'ai vu sur la branche du tilleul

    devant la maison

    et comme il y avait du vent

    les feuilles de l'arbre

    le cachaient par moments

    Peut-être qu'il n'était pas assez bien

    ou peut- être qu'il ne savait pas

    je ne sais pas

    Ce soir, j'irai poser la cage

    au pied du tilleul

     

    Hubert Mingarelli


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  • Robyn Sarah

    Robyn Sarah est une poète canadienne anglophone. Née à New York en 1949 de deux parents canadiens, elle a grandi à Montréal. Ses œuvres sont nombreuses et diverses : poésie, fiction, essais.... Robyn Sarah possède l’étonnante habileté de rendre poétiques les petits détails d’une scène, d’un objet ou d’une situation. Ainsi, sa plume agit comme une loupe sous laquelle les moments du quotidien prennent vie. 

     

    Ça commence avec un homme seul au milieu de son champ, les yeux dans le vide;

    Ça commence avec les os debout d’un orme mort, les os debout d’un orme;

    Avec un enfant sur une clôture qui regarde les nuages défiler au travers de l’orme mort et qui sent lentement l’arbre tomber; 

    Ou avec un enfant couché dans l’herbe qui regarde les nuages défiler au travers du toit de la grange et qui sent lentement la grange tomber; 

    Ou avec ce même enfant, qui croit sentir la Terre tourner.  

    Ça commence avec un homme seul au milieu de sa grange, les yeux dans le vide; 

    Ça commence avec une voiture qui prend le tournant d’un chemin de terre, qui glisse dans le fossé, au ralenti, et s’immobilise à l’oblique contre un mur de buissons, 

    Et dans le silence, un enfant sur le siège arrière s’écrie : « J’ai peur : on va mourir! », même si la voiture s’est déjà arrêtée. 

    Ça commence avec un homme plus bas dans le pré, sa chemise bleue qu’on entrevoit parmi les arbres, 

    Ou avec une voix de femme annonçant l’heure du souper, juste avant le couchant, puis la réponse : silence et un coup de vent. 

    Ça commence avec un enfant qui trouve une balle de fusil vide dans la poussière sur le bord de la route et qui la glisse dans sa poche, 

    Ou qui trouve une taupe morte sur le bord de la route, flatte son pelage soyeux, s’émerveille devant ses mains d’homme et creuse un trou pour l’enterrer près de la grange. 

    Ça commence avec un homme seul au milieu d’un champ labouré, les yeux dans le vide. 

    Et il commence à pleuvoir sur son cou découvert, sur l’angle de ses épaules. 

    Et la pluie mouille maintenant les poils blondis de ses bras musclés qui pendent, 

    Et il pleut plus fort sur sa tête qu’il penche pour se protéger, 

    Il pleut sur une tête indomptable.

     

    Robyn Sarah


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  • José Maria de Heredia

    José Maria de Heredia (1842-1905), né à Cuba, appartient au groupe des poètes parnassiens, qui s'inscrivent en réaction contre le romantisme sentimental et intimiste. De Heredia perfectionne l’art du sonnet par sa maîtrise technique, la justesse de ses termes rares, et la précision des détails. Ses sonnets frappent l’imagination, lançant le lecteur vers l’infini.

     

    Les conquérants

     

    Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal,

    Fatigués de porter leurs misères hautaines,

    De Palos, de Moguer, routiers et capitaines

    Partaient, ivres d’un rêve héroïque et brutal.

     

    Ils allaient conquérir le fabuleux métal

    Que Cipango mûrit dans ses mines lointaines,

    Et les vents alizés inclinaient leurs antennes

    Aux bords mystérieux du monde occidental.

     

    Chaque soir, espérant des lendemains épiques,

    L’azur phosphorescent de la mer des Tropiques

    Enchantait leur sommeil d’un mirage doré ;

     

    Ou, penchés à l’avant des blanches caravelles,

    Ils regardaient monter en un ciel ignoré

    Du fond de l’Océan des étoiles nouvelles.

     

    José Maria de Heredia


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  • Carole David

    Carole David (1954 - ) est une poète et écrivaine québécoise. Allant de la transparence à l’énigme, ses poèmes sollicitent l’accession à la vie, l’ouverture au monde, et le défi de l’amour.

     

     

    Dans la cuisine

    ma mère recousait des ailes

    rapiéçait des membres

    ma mère était une magicienne

    elle faisait des costumes

    des armures avec des pattes

    des pyjamas pour chiens

    des abris pour les âmes

    Un jour

    par une chaude journée d'été

    elle est disparue

    devant le barbecue

    les instruments à la main

    aspirée par un nuage de fumée

    et d'assaisonnements exotiques

    Et moi assise à la table de jardin

    je pressais des citrons

    pour la limonade

    dans la cour inondée de lumière

     

    Carole David


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  • Francis Carco

    Francis Carco (1886 - 1958) est un écrivain, poète, journaliste et parolier français. Il définit lui-même son œuvre comme « un romantisme plaintif où l’exotisme se mêle au merveilleux avec une nuance d’humour et désenchantement ».

     

     

     

    Il pleut 

    Il pleut — c’est merveilleux. Je t’aime.
    Nous resterons à la maison :
    Rien ne nous plaît plus que nous-mêmes
    Par ce temps d’arrière-saison.
     
    Il pleut. Les taxis vont et viennent.
    On voit rouler les autobus
    Et les remorqueurs sur la Seine
    Font un bruit... qu’on ne s’entend plus !
     
    C’est merveilleux : il pleut. J’écoute
    La pluie dont le crépitement
    Heurte la vitre goutte à goutte...
    Et tu me souris tendrement.
     
    Je t’aime. Oh ! ce bruit d’eau qui pleure,
    Qui sanglote comme un adieu.
    Tu vas me quitter tout à l’heure :
    On dirait qu’il pleut dans tes yeux.

     

    Francis Carco


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  • "J'écris" Geneviève Rousseau

    Geneviève Rousseau travaille en tant que journaliste pour enfants dans la presse scolaire belge et auteur d'ouvrages pour la jeunesse depuis une dizaine d'années. Elle participe également à différents projets d'écriture pour adultes. "Mots choisis" (2015) est son deuxième roman.

     

    J'écris des mots bizarres, j'écris des longues histoires

    J'écris juste pour rire des choses qui ne veulent rien dire.

    Écrire c'est jouer

     

    J'écris le soleil, j'écris les étoiles

    J'invente des merveilles et des bateaux à voiles.

    Écrire c'est rêver

     

    J'écris pour toi, j'écris pour moi

    J'écris pour ceux qui liront et pour ceux qui ne liront pas.

    Écrire c'est aimer

     

    J'écris pour ceux d'ici ou pour ceux qui sont loin

    Pour les gens d'aujourd'hui et pour ceux de demain.

    Écrire c'est vivre

     

    Geneviève Rousseau


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  • Vaja Pchavéla

    Vaja Pchavéla, né le 26 juillet 1861 et mort le 10 juillet 1915, est un poète, écrivain et dramaturge notoire de la littérature géorgienne.

     

     

     

     

    L’hôte et l’invité

     

    Enfoui dans la nuit opaque

    Et affadi par les ténèbres,

    Le pays montagneux des Kistes

    Se hérisse en trônes rocheux.

    Une rivière crie sa peine

    Au fond d'un défilé obscur.

    Les montagnes se sont penchées

    Et se débarbouillent, pensives :

    Plus d'un expira sur leur sein,

    L'eau ne les lave pas du sang.

    Cet homme qui suit son chemin

    Veut verser le sang de son frère.

     

    Vaja-Pchavela


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  • Fadhil al-Azzawi

    Né en 1940 à Kirkuk en Irak, basé depuis 1983 à Berlin, Fadhil al-Azzawi a joué un grand rôle dans l’innovation poétique irakienne des années 1960. Ce poète et romancier fonde en 1969 une revue d’avant-garde irakienne qui fut interdite dès le quatrième numéro. Al-Azzawi quitte l’Irak et s’installe en 1977 en Allemagne. Son œuvre compte des romans, des essais et une dizaine de recueils de poésie en arabe ainsi qu’un recueil écrit directement en allemand.

     

    La cheminée

     

    Une cheminée exhale de la fumée dans le vent

    Parfois elle exhale des rêves,

    De la tristesse

    Elle exhale des traces d’hommes

    Rapportant dans la chambre la parole des anciens

    Elle exhale le silence d’une femme

    Entre les bras d’un homme

    Se rappelant la capitale de terreur

    Érigée dans le désert

    Elle exhale nos souvenirs

    Cette cheminée nous exhale jour après jour

    Dans la nuit d’un autre ciel

    Dans le vent.

     

    Fadhil al-Azzawi


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