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Par imaginelitécrit le 15 Février 2021 à 06:28
Clara Lagacé cherche à capter des instantanés du quotidien magnifiés grâce à la mise en vers. Elle explore d’autres formes de création : des suites poétiques pour des lectures. Diverses expériences lui ont permis de confirmer son intérêt pour les prises de parole dont on se réclame afin de faire sens de notre appartenance au monde.
l’Outaouais
sur les rives de l’Outaouais
bercées par le lait chaud au miel lorsque malades
nous avons grandi
loin des rabrouages inutiles
près de l’esplanade sablonneuse de la marina
où survenaient les compétitions hivernales de crazy carpet
de haute vitesse
errant dans les parages connus
nous jouions dans les bois aux reliefs multiples
dûment cartographiés lors des jours de pluie alors que
nous étions entourées d’anciens sourires
en noir et blanc
l’automne les pommes
volées furtivement au verger
par le trou dans la clôture
sucraient le retour à la salle de classe
où je dévorais les livres par dix
nombre maximal hebdomadaire de la bibliothèque
plus tard nous avons rêvé de boîtes en carton de balcons partagés
avec des inconnues
sur les rives de l’Outaouais
avec chaque saison nouvelle l’étau
se resserrait doucereusement
chacune à dix-neuf ans
nous sommes parties
il est routinier ici de déplacer
d’égarer son futur
Clara Lagacé
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Par imaginelitécrit le 13 Février 2021 à 06:28
Jacques Barbaut est un écrivain et poète français, né en 1960 dans le Pas-de-Calais. Sa poésie, visuelle et sonore, malicieuse et savante, alterne entre absurde et extrême minutie. Elle est souvent considéré comme inclassable et singulière.
Clément adhère
Alphonse allait et Charles traînait
Saint-John perce et François bouchait
François clouait et Henri calait
Gustave courbait
Ambroise parait
Gabriel forait et David guetta
Jean-Pierre rive et Alain calma
Henri cochait et Steffi graffe
Léo ferrait et Jean ferra
Georgette plana
Georges marchait
Simone s’ignorait et Henry fonda
Jacques jouait et dérida
Eric cantonna et Jean-Claude qui lit
Marcel et Anouk aimaient
Julien coupa
Mathilde et Emmanuelle saignaient
Gustave et Julien doraient
Charles attend, Martin part et Louis vint
Claude sautait et Jacques rivette
Jean prouvait, Pierre paierait (Benjamin aussi)
Jean jeûnait et Gérard massait
Philippe-Jacques ôtait
Marie redonnait
Édouard levait
Frank zappa
Mata a ri
Boby la pointe
Nicolas boit l’eau
les Frères griment
le Capitaine fracasse
Alfred a d’ l’air
Auguste conte et Roger-Gilbert le compte
Truman capote et Sophie cale
Lucien Lévy brûle et Maurice en rit
Patricia casse
Roger la porte
Nat King colle
King vit d’or
Erich Maria remarque
Max planque, Johnny cache et Tatiana trouvait
Paul-Armand jette
Pierre et Henri bêlent
Joan baise
Carla brunit
Hugo bosse et Eugène sue
Jules va, laisse
Jean, faut trier
Guy l’éclaire
Johnny a l’idée et Nathalie bâille
Christophe mit au sec
Michel serre & pique au lit
Lino vend, tuera
James en sort
Simon entaille et Pierre soulage
Édouard glissant, Raphaël confiant
Jacques chancelle et Alberto tomba
Harvey qu’est tel, et Léa, c’est doux
Samuel becquette et Buster qui tonne !
Georges braque, bataille
Primo, Bernard-Henri les vit
Simone veille
Guiseppe verdit
J’enracine
Pierre reverdit
Georges sera
Mack, c’est net ! et Jérôme, ça varie
Nathalie, ça rote
Anselm, qu’y faire ?
Norman, faut s’ taire !
Keith ? j’arrête !
Jacques Barbaut
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Par imaginelitécrit le 12 Février 2021 à 06:14
Cécile Sauvage, « poétesse de la maternité » née à La Roche-sur-Yon (1883-1927), est un écrivain français, épouse de Pierre Messiaen et mère d’Alain et d’Olivier Messiaen qu’elle éleva, selon ce dernier, dans un « univers féerique ». Elle vécut la majeure partie de sa vie à Saint-Étienne.
Je me souviens de mon enfance
Et du silence où j’avais froid ;
J’ai tant senti peser sur moi
Le regard de l’indifférence.Ô jeunesse, je te revois
Toute petite et repliée,
Assise et recueillant les voix
De ton âme presque oubliée.Cécile Sauvage
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Par imaginelitécrit le 11 Février 2021 à 06:51
Yves Bonnefoy (1923 - 2016), est un poète, critique d'art et traducteur français. Il est considéré comme un poète majeur de la seconde moitié du xxe et du début du xxie siècle.
Lucrèce le savait :
Ouvre le coffre,
Tu verras, il est plein de neige
Qui tourbillonne.Et parfois deux flocons
Se rencontrent, s’unissent,
Ou bien l’un se détourne, gracieusement
Dans son peu de mort.D’où vient qu’il fasse clair
Dans quelques mots
Quand l’un n’est que la nuit,
L’autre, qu’un rêve ?D’où viennent ces deux ombres
Qui vont, riant,
Et l’une emmitouflée
D’une laine rouge ?Yves Bonnefoy
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Par imaginelitécrit le 10 Février 2021 à 06:39
Violette Krikorian (née en 1962 à Téhéran) est une poétesse arménienne. C’est « une figure de proue, une diablesse arménienne ». Il faut dire que jamais en Arménie une poétesse n’a déclenché de tels scandales par sa poésie au langage direct et cru. Elle a fait « paraître un poème de femme dans une société bâtie comme une forteresse arrogante par des hommes »…
AUTOCONFIRMATION
Mouvante, plus mouvante que le destin du sable,
rouge, plus rouge que le destin de la rose,
humide, plus humide que le destin de l'eau, je suis mouvante,
rouge, humide ;
rouge, humide, je suis mouvante,
donc j'existe.
Mes veines : lacets
nouant le fagot blanc de mes os
à ma colonne vertébrale comme à un mât.
Ma colonne vertébrale est très belle,
donc j'existe.
Mes yeux: deux aquariums remplis de lait
où nagent, tournent et frétillent
deux petits poissons vifs, à la queue de velours.
Mes petits poissons vifs nagent toujours,
donc j'existe.
Ma bouche: coffret ornementé, aux deux battants clos,
où s'alignent encore, en uniforme de nacre,
trente fidèles et vaillants soldats.
Mes soldats sont debout,
donc j'existe.
Ne pas être triste.
Me souvenir [...]Violette Krikorian
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Par imaginelitécrit le 9 Février 2021 à 06:11
Tudor Arghezi , né en 1880 à Bucarest et mort en 1967 dans la même ville, est un écrivain roumain principalement connu pour ses œuvres poétiques et sa littérature pour enfants. Il est considéré comme l'un des plus importants écrivains de littérature roumaine du xxème siècle.
Crayon
J’aime ton visage
Et tes yeux de lac pur
Où se reflètent
L’arbre et l’azur.
J’aime ton sourire
Comme la pierre du tréfonds
Où nagent de longs poissons
Blancs, à l’œil rond.
Ta tête je l’aime, tu sais,
Rivage plein de roseaux
Où dorment les araignées
Sur les duvets des cieux.
Ton être tout entier
De chagrin et de joie,
Pourquoi devrais-je l’aimer?
Il ne le faudrait pas…
Tudor Arghezi
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Par imaginelitécrit le 8 Février 2021 à 06:00
Vasilikí Dimoulá, dite Kikí Dimoulá, née Athènes en 1931 et morte en 2020 dans la même ville, est une poétesse et essayiste grecque. Elle a reçu le prix européen de littérature en 2009 pour l'ensemble de son œuvre.
MON DERNIER CORPS
C'est à toi, Soudain, que je m'adresse.
À toi, Soudain nourri de rêve,
beau gosse, d'une bravoure folle,
enfant bâtard de causes inconnues,
qui préserves
du Rare la rareté,
montrant une granitique indifférence
pour la passion lascive, douloureuse,
que nourrit pour toi la Fréquence.
Étincelle du frottement têtu
d'une attente contre un renoncement,
que tu abreuves de carafes et de soifs
sans recours aux sources, aux fontaines.
Temps venu de Dieu,
petit corps
qui accumules ta force monstrueuse
en accumulant des lenteurs,
Messie en un seul mot,
séisme qui abats
nos Invariables antisismiques,
c'est à toi, Soudain, Intercession porteuse du monde,
que déchirée je m'adresse
pour que tu viennes délivrer
mon dernier corps ici-haut
délivrer
sa palpitation asservie
des mains du plus cruel
du plus sanguinaire
du plus paranoïaque des maîtres que j'ai eus
nommé debout-assis
debout-assis
debout-assis...
Kiki Dimoula
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Par imaginelitécrit le 7 Février 2021 à 06:11
Humberto Ak'abal (1952- 2019), était un poète maya kiché du Guatemala. Akʼabʼal a écrit dans sa langue natale de Kʼicheʼ , puis a traduit sa poésie en espagnol. Avec les traductions de ses œuvres dans de nombreuses langues et une reconnaissance internationale, Ak'ab'al est considéré comme "le poète Maya Ki'che" le plus renommé au monde et l'un des écrivains guatémaltèques les plus connus d'Europe et d'Amérique latine.
Là-bas
où moi je suis né,
c'est le seul lieu
où l'on peut s'appuyer sur la nuit
comme sur une balustrade
pour ne pas tomber
dans l'obscurité.Humberto Ak’abal
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Par imaginelitécrit le 6 Février 2021 à 06:02
Zoé Valdés (Cuba, 1959) est romancière, poète et scénographe. Depuis le milieu des années 90, elle opte pour la nationalité espagnole et vit en exil à Paris. Elle est devenue persona non grata à La Havane.. Depuis l’âge de onze ans elle écrit régulièrement des poèmes.
Le vice
Le vice de savoir partir
et de rester
Avec les yeux maltraités
Ciller pendant le sommeil
Absorbée dans l’abyme
Figées les pupilles
Sur les ailes trouées
D’un papillon empoisonné
Le vice de graver un baiser
Sur ta nuque
RigideZoé Valdés
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